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21 septembre 2012

The Scapegoat (Le bouc émissaire) - ITV

D'après le roman de Daphné du Maurier, Le bouc émissaire.

Réalisé et adapté par Charles Sturridge - avec Matthew Rhys (Johnny Spence/John Standing), Andrew Scott (Paul Spence), Sheridan Smith (Nina), Jodhi May (Blanche), Eileen Atkins (Lady Spence), Alice Orr-Ewing (Frances Spence), Eloise Webb (Mary-Lou 'Piglet'), Phoebe Nicholls (Charlotte)

Johnny Spence et John Standing ne se connaissent pas, n'ont aucun parent commun, sont aussi différents que deux étrangers peuvent l'être, et pourtant ils partagent une chose : leur visage.
Lorsque le riche industriel Johnny Spence rencontre par hasard le timide professeur de grec John Standing, les deux hommes semblent se lier d'amitié. Après une soirée arrosée, passée à raconter les évènements insignifiants de sa vie à son double énigmatique, John Standing se réveille dans la chambre d'hôtel de Johnny Spence, dépouillé de ses bagages... et de son identité. A son insu, les deux hommes ont échangé leur nom, et leur vie.

Johnny Spence & John Standing (Matthew Rhys)
Connaissant peu le roman de Daphné du Maurier dont est adapté ce téléfilm, il me sera difficile d'en juger la fidélité à l'oeuvre. Je crois savoir cependant - et à en juger logiquement par le sujet - que cette histoire, comme bon nombre de récits de l'écrivain, ne pouvait assurément que trouver une fin tragique. Cette impression funeste, cette fatalité en quelque sorte d'accomplissement tragique au fil des 1h40 que dure cette adaptation, ne sera jamais remise en cause dans l'esprit du spectateur, impression générale qui sera donc à mon sens sa plus grande force.


Mais venons-en tout d'abord à l'histoire en elle-même, parfaitement à la hauteur de ce que l'on pouvait attendre, et servie par un casting de choix.
The Scapegoat narre donc l'histoire de deux hommes, qui en dépit d'une ressemblance physique frappante, sont aussi différents et aussi éloignés l'un de l'autre qu'il est possible d'imaginer : Johnny Spence est riche, semble comblé, vit dans le luxe et mène grand train. John Standing, est quant à lui un humble professeur de grec au chômage, timide, solitaire et insignifiant. Lorsque l'un échange sa vie avec l'autre, on songe tout d'abord à une bénédiction déguisée... Mais est-ce réellement le cas ? Lorsque John Standing se retrouve entraîné, à demi conscient de sa situation, dans la vie de son alter-ego, qui semble avoir pris la fuite sans espoir de retour, il se découvre une épouse qui tremble dans son ombre, un frère qui le hait, une mère morphinomane qui ferme ses yeux sur ses incartades, et une affaire familiale au bord de la faillite... 
Au fil des heures, et au triste constat de cette situation inextricable, John Standing voudrait chercher à fuir, mais sa conscience l'en empêche. Les espoirs entiers de cette famille déchirée - et déchirée par sa faute ou plutôt la faute de cet autre qui n'est pas lui (!) - semblent reposer à présent sur ses épaules.

John/Johnny et sa "fille", Mary-Lou 'Piglet'
Lorsqu'il décide d'assumer ce rôle qu'on lui a laissé, John Standing passe de l'insignifiance à la superbe, et finira par racheter aux yeux de tous la lâcheté, la cruauté et la perversité de Johnny Spence, en devenant entièrement, totalement, l'autre.

D'abord naïf et faible, le personnage deviendra au fil des jours, le patron, le chef de famille, le frère, le père, et le mari, qui avaient été jusque là non pas inexistants, mais d'une influence si néfaste et si retorse, qu'il était sans doute préférable à tous de l'oublier.

Blanche Spence (formidable Jodhi May)

C'est là le point à la fois le plus remarquable et le plus étonnant de cette adaptation : la capacité de John Standing à devenir Johnny Spence, et le soin tout particulier qu'il apporte à redorer un blason qui d'évidence n'a jamais été le sien. Sans doute son anonymat passé, sa solitude enfin, l'ont presque poussé à endosser le rôle d'un autre, quand bien même ce dernier serait un salaud notoire, mais un salaud qui paraît être au centre de toutes les attentions... Y aurait-il dans cette façon d'agir un besoin de reconnaissance et d'estime ? Sans doute.

Quant à l'entourage de Johnny Spence, et sa réaction générale face aux changements notoires dans sa personnalité, est elle aussi assez étonnante. A vrai dire, s'il y a une certaine surprise décontenancée dans les regards, ils paraissent tous finalement se complaire à cette transformation, aussi surprenante et aussi improbable soit-elle. On en vient finalement à penser, par réflexion toute personnelle, qu'ils savent tous à des degrés divers, que l'homme qu'ils ont face à eux, n'est plus celui qui les a humilié, ruiné, trompé. Celui-là qu'ils souhaitent ne jamais revoir, et qui ne reviendra plus...

Mais lorsque le véritable Johnny Spence refera inopinément surface auprès de Frances qu'il tente d'empoisonner, John Standing saura-t-il s'interposer, au prix même de sa vie ? Je n'en dirai pas plus...

Le véritable Johnny Spence, de retour auprès de Frances

Andrew Scott (Paul)
Venons-en aux acteurs, plus excellents les uns que les autres, Matthew Rhys en tête qui démontre une fois de plus qu'il possède une capacité extraordinaire à interpréter tour à tour des personnages instables ou altruistes...  Soulignons la présence du merveilleux Andrew Scott, dans le rôle du frère blessé et triste, qui passe son temps à baisser les yeux et parler bas, bien loin des extravagances du Moriarty de Sherlock...

Un casting merveilleux, qui sert un scénario magnifiquement traité ! A voir d'urgence !