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26 juillet 2011

Les cages flottantes, de Gaston Leroux


Premières aventures de Chéri-bibi

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Jean Mascard, ou matricule 3216, alias Chéri-bibi. C'est ainsi que se nomme le redouté bandit que la frégate Le Bayard, transporte à son bord sous la plus haute surveillance, jusqu'à Cayenne.

Car en effet, Chéri-bibi est un voleur et un tueur multirécidiviste, un ennemi de l'ordre établi, un dangereux anarchiste.

Malgré qu'il soit enfermé à fond de cales, la révolte gronde, car l'on sait, dans les cages, qu'il prépare son évasion. Soudain, Chéri-bibi disparaît après avoir assassiné ses gardiens. Il n'en faut pas plus à la chiourme pour prendre les armes, et en même temps, le contrôle à bord...

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Voilà encore un personnage incontournable créé par Gaston Leroux en 1913, d'une renommée presque aussi grande que Rouletabille ou le Fantôme de l'Opéra. On retrouve dans ce premier volet des aventures de Chéri-bibi, honnête garçon boucher devenu assassin, tous les éléments qui font la richesse de l'univers de l'écrivain : intrigue efficace nimbée de mystères insondables, des amours contrariées, des meurtres sanglants, le tout mené sous couvert d'un humour gouailleur qui éviterait presque au récit de se prendre trop au sérieux. A l'image de tous les récits du genre (et l'on pense volontiers à la Poupée Sanglante, ou encore à certains récits policiers de la série Rouletabille), Les Aventures de Chéri-bibi, sous ses airs de sympathie forcée, retracent une histoire tragique, comportant dans ses méandres son lot d'horreurs, de mystères et de drame.

Car Jean Mascard, clame son innocence depuis plus de quinze ans. Pour résumer l'improbable récit de ses aventures, nous dirons qu'il s'est trouvé au mauvais endroit au mauvais moment, à plus d'une reprise. A qui la faute ? Mais à la Fatalitas !

Chéri-bibi est-il seulement d'ailleurs un héros ? On peut raisonnablement se permettre d'en douter. Comme beaucoup de personnages principaux des romans de l'écrivain, le héros n'en est pas réellement un. Chéri-bibi, s'il réclame justice pour des meurtres qu'il n'a pas commis, n'hésite pas à passer par les armes ceux qui se trouvent sur son chemin. En quête de réhabilitation, le personnage n'hésitera pas à commettre (ou à subir, c'est à voir), d'autres atrocités.

Une nouvelle fois, l'auteur utilise un thème cher à son coeur : l'usurpation d'identité, le changement d'apparence, l'utilisation du "masque" sous des formes variables. Il y a une similitude indéniable entre le bagnard Chéri-bibi et Bénédict Masson de la Poupée Sanglante. Tous deux sont victimes d'un acharnement du sort, accusés à tort de plusieurs assassinats, et tous deux désireux ou contraints à un modifier leur apparence. Et les raisons en sont également identiques : la volonté de clamer leur innocence, apaisant par la même leur soif de vengeance, tout en assurant leur rédemption auprès de leur absolu féminin, source inépuisable de leur purification physique et mentale. Il en est ainsi que tous les personnages de Leroux, bien que sous différents aspects. Dans le Parfum de la Dame en noir, Larsan ne prend-il pas l'apparence de Robert Darzac, pour retrouver Mathilde ? Erik ne dissimule-t-il pas sa laideur sous un masque pour séduire une jeune soprano ? Bénédict Masson ne confie-t-il pas sa vie et son âme aux soins d'un Dr Frankenstein moderne, pour mieux se faire aimer de Christine ? Et Chéri-bibi n'accomplit-il pas ce même geste en autorisant un médecin aux méthodes peu orthodoxes, à lui faire revêtir l'apparence de son pire ennemi, afin de conquérir Cécily, son amour de toujours ?

Les personnages des grands romans de Leroux sont donc tous à mon sens une seule et même entité. Ils se ressemblent tant que d'un roman à l'autre, le lecteur peut avoir la singulière impression d'être face à plusieurs variantes du même homme. Cela en est de plus en plus frappant, au fil des lectures.

On leur reconnaît à tous une envie unique et obsédante d'être un autre, par tous les moyens les plus extraordinaires qui puissent être imaginés.

D'autre part, l'auteur ne nie pas une certaine parenté amusante au roman de Victor Hugo Les Misérables, car Chéri-bibi lui même se trouve une relative ressemblance à Jean Valjean, sans compter l'acharnement d'un inspecteur de police nommé Costaud, qui n'est pas sans rappeler celui de Javert. (personnage qui n'apparaît que dans le second volet de la série, Chéri-bibi et Cécily)

Et je terminerai en citant ces propos de Gaston Leroux au sujet de son personnage :

"Ce gigantesque petit bourgeois de Pickwick a fait naître en moi un monstrueux bandit de Chéri-bibi, un brave au fond, lui aussi, mais qui est victime des aventures les plus inattendues ; il ne peut faire un pas dans la rue sans assassiner quelqu'un ! Mettez dans cette machine à assassiner un bon coeur et voyez ce qu'elle peut souffrir ! Comique ! Humour ! et mystère, par-dessus le marché ! Si le lecteur n'était pas content, avouez qu'il serait bien difficile."
Extrait du Catalogue de l'exposition Gaston Leroux, de Rouletabille à Chéri-bibi, édité par la Bibliothèque Nationale de France.

Les aventures de Chéri-bibi ont fait l'objet de plusieurs adaptations, dont une série de 13 épisodes, intitulée La Nouvelle Aurore, scénarisé par Gaston Leroux, et sortie dans les cinémas en 1919.

Une autre adaptation, plus connue, a été réalisée en 1937, et interprétée par Pierre Fresnay. Par la suite, Jean Richard, aura donné son visage au bagnard dans une version de 1955.

Article à suivre : Chéri-bibi et Cécily.

18 août 2009

La Poupée Sanglante et La Machine à Assassiner de Gaston Leroux

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Résumé

Benedict Masson, relieur d'art et poète de génie, mais atrocement laid, se meurt d'amour pour sa voisine, la belle Christine Norbert, la fille de l'horloger et la fiancée du prosecteur Jacques Cotentin. Benedict la sait amoureuse d'un étrange personnage, aux allures de statue de cire, qu'elle cache dans sa chambre... Qui est cet homme que nul ne voit jamais, et qui semble dénué de paroles et presque de vie ?
Cependant, quand Christine demande à Benedict de bien vouloir accepter un emploi à ses côtés chez le Marquis, qui la poursuit de ses assiduités, Benedict ne sait pas encore qu'il va être précipité dans une fresque horrifique dont il va devenir à la fois l'acteur et la principale victime. Accusé injustement de multiples meutres, le poète est jugé et condamné à monter sur l'échafaud... A moins que le prosecteur ne ravisse auparavant son âme à la mort...

Mon avis

Ce roman à deux volets de Gaston Leroux est à l'image des romans horrifiques et fantasmagoriques dont seul cet auteur de génie a eu le secret. A la fois très éloigné de la saga des Rouletabille et son style d'intrigue policière, à la fois proche du Fantôme de l'Opéra par la profondeur des personnages qu'il présente, La Poupée Sanglante et la Machine à Assassiner ont leur marque propre (même si on peut bien entendu faire le rapprochement avec le Frankenstein de Mary Shelley). Si on retrouve le style journalistique et précis de Gaston Leroux (dont c'est ici une des dernières oeuvres, publiée en 1923), l'utilisation répétitive de l'italique, sorte de choc "visuel" supplémentaire pour le lecteur qui ne peut s'empêcher d'y attacher toute son attention, les romans sont empreints d'un inévitable parallèle entre le scientifque et l'occulte, entre le rationnalisme et la croyance populaire, entre l'esprit cartésien et l'imaginaire le plus effroyable. Car si certains passages peuvent paraître tout bonnement farfelus, le contenu demeure profondément sombre et réfléchi, suggèrant des interrogations éthiques ou spirituelles qui laissent le lecteur pensif, voire grave.

En deux mots, il s'agit là d'une oeuvre qui ne peut laisser indifférent, qu'elle nous atterre ou qu'elle nous glace.


Si on peut sans aucun doute rapprocher certains personnages de ces romans avec ceux du Fantôme de l'Opéra (notamment au niveau de l'héroïne, dans la similitude des prénoms), ils entrent tout à fait dans une catégorie différente. Chrisine Norbert n'a pas grand chose à voir avec la Christine Daaé jeune et naïve, entièrement effrayée, presque passive et soumise du F de l'O. Christine Norbert est déterminée, impétueuse, en un mot l'antithèse de son (presque) homonyme.

Benedict a une âme semblable à celle d'Erik, malheureuse, géniale, mais violente. Une idée commune les unit : la grandiloquence de leur parole, voire la mégalomanie de leurs actes (puisque peu à peu, chez Benedict/Gabriel, l'absence de parole, est compensée brutalement par une apparence glacée et des actes grandioses, qui envahissent finalement à eux seuls tout l'espace narratif).

Reste aussi l'aspect non négligeable du vampirisme évoqué dans ces romans, qui hante véritablement toute la lecture, et que l'auteur parvient à expliquer d'une façon pour le moins suprenante et quasiment... scientifique... !


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A noter qu'une adaptation de la Poupée Sanglante a été tournée dans les années 70 sous la forme d'un téléfilm, avec Yolande Folliot, Jean-Paul Zehnnacker et Ludwig Gaum, malheureusement indisponible depuis de nombreuses années...

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La Poupée Sanglante et la Machine à Assassiner de Gaston Leroux, disponibles aux éditions Motifs.