20 décembre 2013

Le Mystère de la chambre jaune, de Gaston Leroux

Résumé


Un nuit d'octobre 1892, Mathilde Stangerson est violemment agressée, tandis qu'elle dormait dans la chambre jaune attenant au laboratoire de son père. Aux appels désespérés de sa fille, ce dernier se précipite sur l'entrée, verrouillée de l'intérieur, et sur fenêtres demeurées hermétiquement closes. Défonçant la porte, il découvre la jeune femme inanimée, grièvement blessée, mais aucune trace de son assassin. La police et le parquet, dépêchés sur les lieux, ne parviennent à résoudre le mystère qui entoure cette chambre jaune, de laquelle l'agresseur semble s'être envolé. 
Tous les soupçons se tournent vers Robert Darzac, le fiancé de Mathilde, qui semble déterminé à cacher son emploi du temps à la police.
Le jeune reporter Rouletabille, intrigué par l'affaire, est bien décidé à trouver la clé de l'énigme.

*** 

J'ai lu "Le mystère de la chambre jaune" il y a quelques années, au cours de mon marathon leroussien. Je l'ai lu vite, bien trop vite, et de cette savoureuse intrigue policière je n'avais gardé que quelques souvenirs furtifs. Je l'ai donc relu avec plaisir il y a peu, en prenant le temps d'admirer cette fois, l'ingéniosité de la narration, à la fois concise, dans la pure veine journaliste, et d'une dramatisation passionnée qui a fait les belles heures du roman populaire de la fin du XIXe siècle. Ajoutons à cela cet humour gouailleur, la marque de fabrique des oeuvres leroussiennes, dont la désinvolture fait sourire encore aujourd'hui, plus de cent ans après sa création.

Le Mystère de la chambre jaune s'inspire des plus grands romans d'intrigue anglais : à la lecture, on est amenés plus d'une fois à comparer les méthodes d'investigation des personnages imaginés par Gaston Leroux, qu'ils s'agissent de Joseph Rouletabille ou de Frédéric Larsan, à celles inventées par Arthur Conan Doyle. La méthode holmesienne est passée par là, et Gaston Leroux ne prendra pas la peine de le nier, puisque son jeune héros la citera d'ailleurs dans les premiers chapitres (pour la dénigrer ensuite d'ailleurs, mais Maurice Leblanc ne s'en privera pas non plus dans Arsène Lupin contre Herlock Sholmès, écrit la même année). D'autre part, le véritable mystère de la chambre jaune trouvera ses racines en Amérique, comme Conan Doyle l'a fait dans Une Etude en Rouge.  
Ensuite, il y a la tentative de meurtre, perpétrée dans une chambre hermétiquement close, aux fenêtres et aux portes verrouillées de l'intérieur, qui ne peut que rappeler le récit du Ruban moucheté, ou encore, Le Double assassinat dans la rue Morgue, d'Edgar Poe, considéré comme l'un des premiers romans d'intrigue. Les "ficelles" du Mystère de la chambre jaune sont donc bien connues, mais à la différence de ses homologues anglais, il n'y a réellement aucune entrée, ni d'ailleurs aucune sortie possibles (ni cheminée, ni trappillon, ni double mur). C'est ce qui fait tout son intérêt, et toute son emblématique singularité. 

L'autre intérêt de ce roman, et non des moindres, est sa riche galerie de personnages, attachants ou détestables, fous ou tendres, honorables ou traîtres, qui ne peuvent que susciter l'attachement du lecteur.

Même si le récit est mené par Sainclair, l'ami avocat de Rouletabille (projection, sans doute, de Leroux lui-même, ancien avocat reconverti dans le journalisme puis dans la littérature), la figure centrale du roman est bien entendu ce jeune reporter de 18 ans à peine (et toujours représenté dans les différentes adaptations avec 15 ans de trop, cela dit en passant), jovial et quelque peu extravaguant, globalement assez sympathique, mais qui possède une très haute opinion de lui-même. Rouletabille aime les défis, et comme Sherlock Holmes avant lui, adore damer le pion à la police, incarné ici par l'éminent inspecteur de la Sûreté, Frédéric Larsan. Rouletabille, malgré son caractère affable, ménage ses effets et adore théâtraliser ses révélations, en cachant la plupart du temps à son plus fidèle ami, les éléments les plus importants de l'intrigue (tiens, cela n'est-il pas sans rappeler ce cher docteur Watson...?).

Frédéric Larsan, seconde grande figure de ce roman, incarne la police toute puissante, respectée et respectable, ingénieuse mais rigide, tour à tour objet d'admiration ou de haine pour le jeune reporter. Larsan et Rouletabille, dès les premières pages, se ressemblent. Se ressemblent trop, peut-être. D'ailleurs, on sentirait presque venir à des lieues à la ronde une crise, un drame, entre ces deux là.  
Ils passent, d'un instant à l'autre de la franche camaraderie à de farouches confrontations. Les deux caractères sont profondément similaires, mais ils n'ont pas, dirons-nous simplement, les mêmes objectifs...
Larsan, malgré son apparition récurrente dans le roman, demeure une énigme, et Leroux le traitera avec autant de mystère et de singularité que les personnages les plus emblématiques de son oeuvre, comme Erik dans le Fantôme de l'Opéra, Chéri-bibi, Bénédict Masson de la Poupée Sanglante, ou encore Patrick, le peintre tragique du Coeur Cambriolé. Frédéric Larsan, fait à mon sens partie de la meilleure production leroussienne en terme de personnalité retorse.  

En effet, car il faut savoir que le mystère de cette fameuse chambre jaune n'est tout simplement pas celui que l'on croit. Il est ailleurs, dans le passé de Mathilde Stangerson, victime d'un mystérieux agresseur dont elle voudra toujours taire le nom. Et là, on retrouve à nouveau un heureux hommage à la littérature anglaise, et particulièrement à La Pierre de Lune, de Wilkie Collins, grand maître du polar victorien...  

Mathilde Stangerson est comme toutes les héroïnes leroussiennes : malgré leur force de caractère, ce sont des femmes sous emprise. Elles sont à la merci de personnages noirs, véritables figures gothiques, dont elle ne peuvent pas - ou ne veulent pas - se défaire. Un terrifiant mélange d'attraction et de répulsion qui sera la marque définitive des créations féminines de l'auteur.
  
L'autre "griffe" leroussienne, est probablement le rappel incessant à l'imbroglio des personnalités de certains protagonistes. Elément qui sera la pierre angulaire du Parfum de la Dame en noir, suite du Mystère de la Chambre jaune, plus émotif peut-être que le premier volet. De plus, si la résolution du drame survenu dans la chambre jaune trouve une explication plausible, il n'en va pas de même pour les autres intrigues "satellites" du roman, qui feront l'objet de résolutions retorses, à l'extrême limite du plausible, dont seul Leroux en a le secret. L'auteur avait une grande fascination pour l'extraodinaire et le sensationnel, deux marques de fabrique des grands romans populaires de la fin du XIXe siècle.

A noter, comme je le disais plus haut, qu'il est absolument indispensable de lire Le Parfum de la Dame en noir, après le Mystère de la Chambre jaune, les deux romans étant profondément indissociables... Si Rouletabille lève le voile sur l'intrigue du premier volume, il met au jour ses propres zones d'ombre, et ses douleurs d'enfant abandonné.

A suivre : Le Mystère de la Chambre jaune et Le Parfum de la Dame en noir, de Bruno Podalydès.

04 décembre 2013

La Belle et la Bête, de Christophe Gans : bande-annonce

Encore une nouveauté : la bande-annonce de la Belle et la Bête, de Christophe Gans a été dévoilé hier... 

Death comes to Pemberley : trailer

Après des mois d'attente, voici enfin le trailer de Death comes to Pemberley, une adaptation du roman de P.D. James, qui sera diffusé sur BBC One, au cours de leur prochain "Christmas Package"... 

Après en avoir parlé il y a quelques mois dans cet article, je puis en dire un peu plus sur l'oeuvre dont ce téléfilm est tiré :  P.D. James a décidé de plonger ses personnages en pleine tourmente, puisque Wickham se trouve accusé de meurtre. Darcy, marié maintenant à Elizabeth, se voit contraint à résoudre cette affaire trouble, d'autant plus que le crime a eu lieu sur ses terres... 

Ce roman est un joli clin d'oeil à l'oeuvre de Jane Austen, par une originale incursion d'éléments d'intrigue policière dans les salons feutrés de la Régence si chers à l'auteur, et ce sans en révolutionner le fond original. Seulement voilà, malgré une intrigue bien menée et une écriture agréable et fluide, Death to Pemberley ne m'a pas séduite. Ou plutôt, l'histoire m'a parue étrangement convenue, ce qui était en soi assez prévisible. 
Mais enfin, même si je n'ai pas été emballée par le roman, je me laisserai volontiers séduire par ce téléfilm, qui a un casting plus qu'alléchant... Parce que Matthew Rhys qui se glisse dans les bottes de Mr Darcy, on ne manquerait ça sans aucun prétexte...