S'il était compliqué de résumer les deux premières saisons de Twin Peaks, il se révélera complètement impossible de faire un pitch cohérent de cette troisième saison, toujours conçue par David Lynch et Mark Frost. Plus de vingt-cinq ans se sont écoulés depuis la diffusion des premières saisons de cette série, passée au statut de mythe. Très honnêtement, j'attendais énormément de cette troisième saison, et dans la hâte de retrouver la galerie de personnages tout aussi inquiétants ou délirants les uns que les autres, cette trame si fantasmagorique, et ce ton si unique qui oscille entre drame fantastique, thriller et comédie, je me suis engouffrée dans ce visionnage en tâchant de naviguer entre les spoilers qui inondaient la toile. Je partais donc sans aucun autre a priori que l'excellent souvenir que j'avais gardé de mon visionnage de la série originale. Dès le premier épisode de cette saison 3, le ton est donné : on va naviguer dans l'absurde et le cauchemardesque. Vous avez ressenti le malaise de votre vie en regardant le dernier épisode de la saison 2 ? Rassurez-vous : vous ressentirez un malaise similaire durant l'entièreté de ce "reboot" ! C'est sanglant, bizarre, incohérent comme un cauchemar... Les personnages d'origine sont là, comme rentrés à coup de chausse-pied dans un univers complètement détricoté. On a beau dire, Twin Peaks a été à son époque d'une très grande originalité, car cette série cassait joyeusement les codes de tout ce que l'on connaissait jusqu'alors. Lynch a sans doute voulu se démarquer en présentant quelque chose de nouveau, qui ne sentirait pas le réchauffé. Mais il s'agit de David Lynch, ne l'oublions pas, l'empereur du non-sens et des trames tarabiscotées. Alors je confirme, c'est nouveau, ce n'est pas du réchauffé, mais en réalité, à force de vouloir trop sortir des sentiers battus, on obtient quelque chose de tellement décousu et de tellement malsain, qu'on reste en état hypnotique devant l'écran, sans trop savoir ce que l'on regarde... Au bout d'un moment, j'ai arrêté de m'interroger sur le scénario et ses trous béants, ce serait comme tenter de justifier et de donner sens à une suite de mauvais rêves. A vrai dire, je n'ai continué le visionnage que pour savoir si toutes ces incohérences finiraient pas se structurer à un moment donné. J'ai terminé le dix-huitième épisode sans avoir eu le moindre éclaircissement en la matière, en continuant à me demander si je venais de visionner du cinéma d'auteur ou un incommensurable navet... On pourra arguer du fait que Lynch et Frost travaillent toujours plus par symbolisme et par ellipses, évitant les écueils d'une narration linéaire, sans doute trop traditionnelle à leur goût. Mais je vous dis, le symbolisme n'excuse pas tout. Je suis d'ordinaire très bon public, et il m'est arrivé, à certains moments d'apprécier certains aspects de cette narration déstructurée, mais le problème est que le spectateur est trop déstabilisé pour appréhender au final quoi que ce soit. A force de vouloir être volontairement obscur, le scénario a perdu forcément de son charme ou même de son bien-fondé. On assiste donc à une suite de scènes issues de délires malsains, laissant loin derrière elles les heureux mélanges de genre des deux saisons originales de Twin Peaks. Cependant si le but était de mettre le spectateur à tout prix mal à l'aise, le pari est plutôt tristement réussi...
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25 avril 2018
21 octobre 2016
Twin Peaks, série de David Lynch et Mark Frost (1990-1991)
Série diffusée de 1990 à 1991, déclinée en 2 saisons et un total de 30 épisodes.
Avec Kyle MacLachlan (Dale Cooper), Michael Ontkean (Harry Truman), Sherilyn Fenn (Audrey Horne), Warren Frost (Dr Hayward), Richard Beymer (Benjamin Horne), Lara Flynn Boyle (Donna Hayward), Piper Laurie (Catherine Martell), David Lynch (Gordon Cole),...
L'agent spécial du FBI, Dale Cooper, est dépêché dans la petite ville de Twin Peaks afin d'y résoudre le meurtre de Laura Palmer, une jeune lycéenne qui semblait appréciée et admirée de tous. Avec l'aide de la police locale, Dale Cooper s'aperçoit rapidement que Laura n'était pas la jeune fille dévouée et aimante que tout le monde connaissait. A vrai dire, aucun habitant de Twin Peaks ne semble être celui que l'on pense... Entre rêves prémonitoires, visions et prophéties, Dale Cooper va dérouler peu à peu le terrible écheveau qui le mènera à l'assassin, à condition qu'il existe réellement...
***
Comment exprimer de manière concise mon sentiment après le visionnage de cette série terriblement addictive ? Disons pour résumer que j'ai l'impression d'avoir reçu une grande claque ! Alors que sa réalisation n'est pas neuve, et que l'image a parfois un peu vieilli (elle accuse tout de même vingt-cinq ans d'âge), n'empêche : après avoir visionné en mode marathon les 30 épisodes originaux de la série, dont un épisode pilote d'1h30, je ne peux qu'affirmer avoir été terriblement emballée par son cadre oppressant, sa trame retorse, et ses personnages tour à tour délirants, fous, extravagants, lunaires, parfois même drôles, alors que l'on baigne dans une atmosphère d'une pesanteur inimaginable... Je n'avais jamais vu de ma vie un seul épisode de Twin Peaks, mais connaissais son statut d'oeuvre quasi-mythique, j'ai donc pu profiter pleinement de la découverte, sans trop savoir ce que la série allait me réserver... Je suis en général très peu enthousiasmée par les séries américaines, mais je savais qu'avec David Lynch, on doit s'apprêter à plonger dans un univers très particulier, qui se veut toujours réaliste et cartésien sur le fond, mais qui sur la forme, emprunte de surprenants chemins de traverse. On bascule rapidement dans le fantastique, le tout nimbé d'un humour décalé, délicieusement noir, que l'on ne se serait pas attendu à trouver dans un tel contexte.
L'épisode pilote s'ouvre par la découverte du corps d'une adolescente, Laura Palmer, dans la petite ville paisible de Twin Peaks, située près de la frontière canadienne. Il y fait froid, humide, sombre, les forêts y sont lugubres, impénétrables. L'arrivée d'un agent fédéral y est d'ailleurs vu tout d'abord d'un mauvais oeil par le sheriff Truman (Michael Ontkean), mais Dale Cooper (Kyle MacLachlan), malgré ses allures intransigeantes d'agent fédéral qui frôlent la caricature (costume sombre, imper beige, mine arrogante), arrive à très rapidement gagner la confiance de la police locale, voire même de tous ceux qu'il approche. Sous ses dehors hermétiques, le personnage se révèle sympathique, bien que fantasque, et ses méthodes pour rechercher l'assassin de Laura Palmer le sont tout autant. Doté d'une sorte d'obscure préscience dont lui seul maîtrise les codes, ce Sherlock Holmes aux résultats infaillibles parvient à inquiéter presque autant qu'il ne rassure. Avec cette gueule d'ange, cette distinction à la Cary Grant, et ce regard glaçant, l'acteur a merveilleusement su camper ce personnage troublant sans le rendre monocorde.
D'autre part, la galerie de personnages de la série toute entière est une véritable curiosité. Ils sont d'ailleurs si nombreux dans cette histoire foisonnante, étrange, décalée, qu'il serait impossible de tous les citer, mais ils n'en sont pas moins chacun passionnant de bizarrerie, de détachement ou de fourberie... Chacun, dans une certaine mesure aura un rapport direct avec le meurtre crapuleux de Laura Palmer, qui reste le fil conducteur de la série. Mais que l'on ne s'y trompe pas : à mesure que progresse l'enquête, il s'avère que la mort de la jeune fille mène à des intrigues de plus en plus tortueuses, à des mystères de plus en plus inconcevables et retors dans lesquels les personnages semblent pris comme à l'intérieur d'une toile. Personne n'est réellement innocent à Twin Peaks, et Dale Cooper sera amené à soupçonner tout le monde et personne en même temps... Les meurtres et les disparitions s'enchaînent, des intrigues secondaires se font et se défont, tandis que le mystère de Twin Peaks s'épaissit.
Pour toutes ces raisons, on aura compris que le sentiment post-visionnage est très difficile à décrire, tout autant d'ailleurs que d'essayer de retracer la trame sans trop en révéler. Elle est trop complexe pour cela, mais elle n'en est pas pour cela déconstruite, au contraire : elle est précise, presque chirurgicale, mais recèle dans chaque épisode son lot d'événements imprévisibles, rendant le visionnage extrêmement anxiogène... Ses personnages, eux aussi, subissent des évolutions surprenantes tout au long des 30 épisodes, sans que jamais cela ne se révèle contradictoire. Les assassins et les innocents ne sont pas forcément ceux que l'on croit, et les rôles s'inversent perpétuellement, aussi ne peut-on réellement se fier à personne, car le mal rôde partout. D'ailleurs, n'est-ce pas le mal, le véritable personnage central de la série, celui qui dicte aux personnages leurs actions les plus infâmes et les plus noires ?
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L'agent Cooper (Kyle MacLachlan) |
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Les visions et les rêves de Dale Cooper |
D'autre part, la galerie de personnages de la série toute entière est une véritable curiosité. Ils sont d'ailleurs si nombreux dans cette histoire foisonnante, étrange, décalée, qu'il serait impossible de tous les citer, mais ils n'en sont pas moins chacun passionnant de bizarrerie, de détachement ou de fourberie... Chacun, dans une certaine mesure aura un rapport direct avec le meurtre crapuleux de Laura Palmer, qui reste le fil conducteur de la série. Mais que l'on ne s'y trompe pas : à mesure que progresse l'enquête, il s'avère que la mort de la jeune fille mène à des intrigues de plus en plus tortueuses, à des mystères de plus en plus inconcevables et retors dans lesquels les personnages semblent pris comme à l'intérieur d'une toile. Personne n'est réellement innocent à Twin Peaks, et Dale Cooper sera amené à soupçonner tout le monde et personne en même temps... Les meurtres et les disparitions s'enchaînent, des intrigues secondaires se font et se défont, tandis que le mystère de Twin Peaks s'épaissit.
Pour toutes ces raisons, on aura compris que le sentiment post-visionnage est très difficile à décrire, tout autant d'ailleurs que d'essayer de retracer la trame sans trop en révéler. Elle est trop complexe pour cela, mais elle n'en est pas pour cela déconstruite, au contraire : elle est précise, presque chirurgicale, mais recèle dans chaque épisode son lot d'événements imprévisibles, rendant le visionnage extrêmement anxiogène... Ses personnages, eux aussi, subissent des évolutions surprenantes tout au long des 30 épisodes, sans que jamais cela ne se révèle contradictoire. Les assassins et les innocents ne sont pas forcément ceux que l'on croit, et les rôles s'inversent perpétuellement, aussi ne peut-on réellement se fier à personne, car le mal rôde partout. D'ailleurs, n'est-ce pas le mal, le véritable personnage central de la série, celui qui dicte aux personnages leurs actions les plus infâmes et les plus noires ?
La série se termine d'ailleurs sur une telle note, qu'on ne sait réellement pas à quoi s'en tenir. Au passage, je précise que cela faisait très longtemps que je n'avais pas été autant impressionnée par un cliffhanger, ni d'ailleurs autant glacée... Après vingt-cinq ans, David Lynch s'est remis à la réalisation d'une 3e saison - toujours avec le même casting divin - qui sera diffusée aux Etats-Unis en avril 2017... La seconde saison s'étant conclue en laissant la porte largement ouverte à une suite, on patiente et on espère - dans une certaine angoisse - le retour des insondables et noires intrigues de Twin Peaks...
Teaser de la saison 3 :
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